Les Jacob - l'ébéniste de 5 rois et 1 empereur
Dans la grande histoire des ébénistes, les Jacob font partie des tous meilleurs.
Retour dans l'histoire des grands ébénistes, cinq rois et un empereur, une histoire familiale rare dans le monde du bois.
Mais avant de lire l'histoire (tirée d'une revue de 1969, lue et ici résumée) Jacob c'est l'inventeur, on lui doit l'adoption de l'acajou dans les sièges, mais aussi l'invention du dossier de fauteuil ou de chaise ajouré si prisé à l'époque de Louis XVI.
En forme de lyres, gerbes, carquois, montgolfières pour ne citer qu'eux, dans ses décors il a fait entrer les fleurs champêtres dans l'histoire des arts décoratifs.
Il est celui qui fera le style Empire.
De ses ateliers sortirent des milliers de meubles avec trois points communs : très architecturés, en bois d'acajou, et ornés de bonzes minces d'une ciselure délicate.
Il travailla avec deux bronziers Thomire et Odiot pour l'exécution des têtes de lions, d'aigles ...
Aujourd'hui nombre de ses merveilles sont visibles à Fontainebleau, Compiègne, Grand Trianon ...
Meuble d'appui de Jacob-Desmalter exécuté rue Meslée entre 1803 et 1813. En bois d'acajou moiré. Le dessus est recouvert d'un marbre bleu-turquin. Sur les montants figurent 2 termes. Les bronzes des deux portes représentent "Vénus Anadyomède" et "Flore".
L'histoire commence le 6 juillet 1739, Georges Jacob naît à Cheny dans l'Yonne.
En 1756 il monte à Paris, il a 17 ans, et pendant 6 ans il fait son apprentissage de menuisier en sièges dans l'un des ateliers du Faubourg Saint-Antoine. Ensuite il sera compagnon chez Delanois (grand spécialiste des sièges dont certains sont encore à Versailles).
En 1765 à 26 ans, il est reçu maître et il s'installe rue Meslée (maintenant rue Meslay) c'est une petite rue avec beaucoup d'artisans menuisiers, ébénistes et sculpteurs.
Il rencontre une voisine Jeanne Loyer d'une famille de brodeurs, en 1767, il l'épouse et il fera 5 enfants : Georges, l'ainé, nait en 1768, François-Honoré Georges nait en 1770, Louis en 1771, Elizabeth en 1772 puis Marie-Victoire en 1774.
Fauteuil directoire. On remarquera les consoles sculptées en forme de dauphins et la frise du dossier au décor "à l'antique".
Les affaires vont bien pour Georges Jacob, il faut dire que l'ébéniste ordinaire travaille pour le Comte de Provence, futur Louis XVIII, et est le fournisseur des Menus Plaisirs de Louis XVI.
Il achète l'immeuble rue Meslée pour s'agrandir. C'est que le nombre de clients augmente avec le Prince de Condé, Madame Elisabeth, le Duc de Chartres ...
Après le passage mouvementé de la Révolution, Georges Jacob est âgé, 57 ans alors que la moyenne de vie est à peine de 30 ans. Il vend le fonds de commerce à ses deux aînés en 1796. Mais l'histoire ne s'arrête pas là, 5 ans plus tard son fils Georges meurt, le vieux décide de former une nouvelle société et s'associe à son second fils François Honoré-Georges dit Jacob-Desmalter. Si le père ne manie plus les gouges, son entreprise est l'égale de celles d'un Boulle ou d'un Riesener.
En 1813, l'entreprise est en faillite, "il s'occupe plus de la qualité des matériaux et de la perfection de leur mise en oeuvre que du calcul économique". C'est le moment pour l'architecte Fontaine de présenter Jacob à Napoléon. Ceci n'empêchera pas que Jacob de mourir ruiné à la veille de ses 75 ans le 5 juillet 1814.
A droite chaise en acajou. Le dossier, à crosse est décoré de palmettes et de rinceaux. Selon le style inauguré par Georges Jacob la planchette du dossier est ajourée et sculptée de croisillons et de rosaces. A gauche petite chaise d'Alphonse Jacob-Desmalter, le représentant de la troisième génération de cette famille d'ébénistes. Derrière, groupe en marbre de l'école de Casanova : l'Amour et Psyché.
Une Bergère à dossier à crosse en bois peint blanc et or recouverte de feutre rouge, fait partie d'un ensemble de deux bergères et de quatre chaises. Ce salon provient du château de Maisons-Laffitte et appartient au maréchal Lannes.t
Retour en arrière. L'entreprise de Jacob-Desmalter se porte bien, compte 16 ateliers pour 800 ouvriers. Encore simple général, Bonaparte s'était déjà adressé aux frères Jacob pour meubler l'appartement qu'il occupait avec Joséphine rue de la Victoire. Ensuite ce sera la bibliothèque, le salon et la petite galerie de la Malmaison. Lorsque Napoléon devient Empereur, l'ébéniste se voit confier presque exclusivement l'ameublement des différents palais impériaux : Tuilerie, Saint-Cloud, Fontainebleau ...
C'est aussi lui qui fabrique les trônes, dont celui du couronnement. Napoléon exige que tout soit livré sans délai et fait refaire les pièces qui ne lui plaisent pas, ce qui oblige d'avoir de nombreux ouvriers.
D'après les factures retrouvées, on a estimé à 2.248.000 francs de l'époque le chiffre des commandes pour les palais impériaux. On sait que le guéridon de l'Abdication conservé à Fontainebleau, à couté 80 Francs.
L'importance d'une telle affaire rendait fragile l'entreprise. En 1813 les guerres laissent la France exsangue, l'argent manque et provoque la faillite de l'entreprise.
Mais le génie de l'ébéniste reste entier, et ce sont ses propres créanciers qui le remirent à la tête de son entreprise avec le retour de Louis XVIII. Il travaille alors pour l'ancien client de son père. Il retire les aigles et quelques décors trop symboliques, puis il meuble le Palais Royal.
Il cède ses ateliers à son fils, celui-ci Alphonse Jacob- Desmalter, renonçant à sa carrière d'architecte. Il va la diriger sans éclat jusqu'en 1847, pour la vendre à Jeanselme.